Nuits « centrées » en Forêt

À propos des Nuits Centrées

Vous avez envie de vous inscrire à la « Nuit Centrée » ?
Félicitations d’avoir le courage de vous offrir cette belle expérience !

La « nuit centrée » vous propose

  • Une coupure avec la routine, les repères, les croyances, …
  • La sécurité affective et émotionnelle dans le groupe
  • Le respect et l’écoute des accompagnants
  • La sécurité physique
  • Une nuit à la belle étoile
  • La convivialité et l’énergie du groupe
  • La joie de vivre, la simplicité, le rire
  • Une bienveillance avec vous-même et les autres
  • Le respect et la confidentialité du groupe et des animateurs
  • Plus de conscience et de clarté sur vous-mêmes et sur ce qui est important pour vous

Le programme

Le rendez-vous est fixé le samedi en milieu d’après-midi dans un lieu qui permet à chacun de faire connaissance les uns avec les autres. Cette façon de pratiquer aide la personne à ancrer sa présence dans le groupe de parole. Un espace-temps est dévolu pour que la personne puisse poser les questions importantes et relatives à l’activité.

Une fois la cadre de l’activité expliqué et compris par chacun, nous soupons ensemble en partageant ce que vous et nous aurons apporté. En général, il reste encore de quoi se nourrir le lendemain matin. Néanmoins, nous vous proposons de prendre ce que vous estimez nécessaire pour vous alimenter et vous abreuver le soir et le lendemain matin.

L’invitation est de vous laisser guider vers une expérience nocturne en forêt…

Des méditations guidées ponctuent une promenade silencieuse qui débute à la fin du jour. Les promenades de l’aller et du retour font chacune 3-4 km. Durant ces marches, vous portez votre sac à dos. Cependant, nous pouvons prévoir un transport des bagages sur site en cas de problème physique (veuillez nous en informer à l’avance).

Au coucher du soleil, nous partons d’un camp de base où vous pouvez choisir de rester ou de revenir si, pendant l’expérience, vous en sentez le besoin. Sinon chaque participant est invité à créer son « nid » pour passer la nuit à la belle étoile. Nous veillons tout près mais suffisamment loin pour vous permettre de vivre pleinement l’aventure. Un abri est installé pour parer à toute éventualité (pluie, …).

Cette nuit en forêt est une expérience individuelle et ne se déroule donc pas en groupe. Elle demande un minimum d’engagement personnel et un sens des responsabilités.
Elle n’est pas anodine, aussi, si pour l’une ou l’autre raison, vous ne vous sentez pas prêt à passer la nuit seul en forêt, vous n’y êtes pas obligé.

Intégration et transformation

Au lever du jour, nous nous retrouvons au camp de base à une heure que nous avons convenu ensemble la veille. Dans la forêt qui se réveille peu à peu, nous marchons vers notre point de départ. Quelques arrêts, vous serons proposés pour vous aider à intégrer doucement les messages que vous avez reçu de cette Nature généreuse. Puis nous prenons le petit déjeuner ensemble. Enfin, un temps de parole, particulièrement important dans ce type d’expérience, vous montrera la richesse et la valeur inestimable de ce que nous partageons avec vous.

La journée se termine vers 12h30 au plus tard pour laisser à chacun suffisamment de temps pour reprendre le rythme de sa vie. Prévoyez un temps suffisant avant de reprendre votre quotidien.

Matériel – Équipement – Nourriture

Nous devons prévoir

Pour le groupe :

  • Huiles essentielles afin de repousser les petites bestioles et soigner les petites piqures
    éventuelles (Nous pouvons partager les nôtres, n’en acheter pas si vous n’en n’avez pas)

Individuellement :

  • un carnet de afin de prendre des notes sur votre expérience
  • vêtements de rechange ? (pensez à une pluie éventuelle)
  • la toilette sera réduite à sa plus simple expression (lingettes, savon-gant de toilette, brosse à dent)

Nous devrons emporter avec nous dans le bois

Le matériel mentionné ci-dessous devra être porté. Munissez-vous donc d’un sac à dos de manière à ce que la marche soit la plus confortable et la plus silencieuse possible)

  • Un sac de couchage
  • Un tapis de sol
  • Des vêtements de pluie
  • Des chaussures de marche
  • Une lampe torche ou frontale et un couteau (canif ou Opinel)
  • Une gourde ou bouteille d’eau
  • Gsm
  • Papier wc le plus écolo possible
  • Un ou deux sacs plastiques pour emmener vos déchets éventuels avec vous

Attention

Veillez à ne pas emporter de la nourriture en forêt pour éviter d’attirer inutilement le gibier.

Co-animation, collaboration, co-création

Partager les expériences, partager les compétences, quoi de plus agréable … c’est toujours un challenge d’une richesse inestimable. C’est la raison pour laquelle, chacune de nos nuit en forêt sont réalisées par plusieurs intervenants. Alors en route vers la lune et les étoiles ?

Témoignages

Une nuit en forêt
Christine Kristof-Lardet, le 31.05.2013

Écologie intérieure

L’expérience de la forêt peut être vécue comme une expérience « religieuse », au sens où elle permet de se relier à la nature, à soi-même et à ce qui nous dépasse. Plongée dans les entrailles d’un monde à la jonction du visible et de l’invisible, du conscient et de l’inconscient.
Quand j’entre dans une forêt, j’entre dans un monde, et presque malgré moi, à la lisière entre le clair et l’obscur, je m’incline. Mes genoux cèdent et ma tête se courbe. Comme lorsque j’entre dans une église. Je deviens silence… Je salue. Je ne peux aujourd’hui franchir l’orée d’un bois sans que quelque chose en moi se transforme à l’instant. Mes sens s’éveillent. La joie pointe. Je me surprends à sourire, à frémir. Enfin !
Je suis là. Je respire. Ma révérence consacre l’espace qui, en retour, s’ouvre et me reçoit. Mon esprit s’accorde à l’unisson et change de fréquence. Dehors, je suis comme sourde. Là, j’entends et je vois à nouveau tout ce qui tressaille autour de moi. La nuit, bien sûr, c’est encore plus fort. Il n’y a pas de tricherie possible. Je suis livrée à moi-même, sans autre alternative que de m’y réfugier. C’est alors que commence la véritable rencontre.

Pas à pas dans la forêt

Généralement, avant de passer la nuit dans la forêt, j’effectue un premier repérage à la lumière du jour, toutes antennes déployées pour « sentir » l’endroit et évaluer les risques. Non pas ceux de la nature, prévisibles et contournables, mais ceux liés à d’éventuelles rencontres importunes. Dans nos forêts occidentales, le seul prédateur sur lequel s’exerce ma vigilance est l’homme, qui plus est celui muni d’un fusil. Mes sens, à l’affût du moindre craquement, du moindre brin de voix, de la moindre trace de passage, s’aiguisent.
Je redeviens animale, vive et instinctive. J’apprends à me cacher et à rendre ma présence de mammifère femelle indétectable. Au moindre doute, je m’accroupis dans un fossé, je grimpe à un arbre ou me recouvre de feuilles mortes jusqu’à me rendre invisible. Si je ne suis en confiance ni avec le lieu, ni avec mes propres capacités –peur, hésitation, fatigue soudaine… – je rebrousse chemin. Si en revanche tout me semble juste, à sa place, je me prépare pour la nuit et, tapie comme une renarde dans sa tanière, j’attends la venue de la pénombre protectrice.

Au cœur de la nuit

Les oiseaux ont chanté leur dernière mélodie du soir, l’obscurité s’intensifie, l’air devient plus coupant et le silence plus dense. Comme derrière le rideau qui vient de tomber sur une scène, tout s’anime : les arbres s’étirent et changent de forme, les animaux sortent de leur cachette, le chevreuil ose une échappée dans la clairière, les sangliers labourent la terre à la recherche de nourriture et moi, je m’immisce plus avant dans les profondeurs.

Je ne reconnais plus rien. Les distances, les reliefs, les sons… tout a changé. Dans l’immensité de la nuit, le moindre bruit prend une ampleur disproportionnée. Ce ne sont que froissements, craquements, souffles et frémissements. Derrière moi, une branche cède. Je me retourne. A quelques mètres, un gros sanglier mâle me toise en grognant. Je n’ai pas toutes les clés. Est-il fâché ou juste curieux ? Je respire largement et me met en « stand by ». Apparemment, il m’accepte sur son territoire puisqu’il repart fureter.
Je n’ai ni lampe, ni GPS et mon portable – éteint – n’est là qu’en cas de pépin, au fond de mon sac. Pour tout bagage je n’ai qu’un bâton – histoire de me donner un peu de contenance – de bonnes chaussures, un duvet, de l’eau et de quoi grignoter pour le matin. Plus j’avance dans la forêt, plus je deviens légère, comme si je me libérais de mes entraves et me nettoyais.
J’entre progressivement en affinité avec ce qui m’environne et me constitue tout à la fois. Dans l’obscurité qui s’est refermée derrière moi et qui me protège, guidée par la lune, je finis par voir clair comme en plein jour. Alors, seule au milieu de l’univers, je m’abandonne. Chaque parcelle de mon être entre en résonnance avec une parcelle de la forêt en de subtiles correspondances : l’étoile scintille dans ma tête, la feuille frémit dans mon dos, l’insecte tambourine dans ma cage thoracique, l’herbe sèche se froisse dans ma nuque, la souris rit dans mon cœur…

Dans les profondeurs du corps et de l’âme

Je deviens forêt. C’est un réveil en cascade des sens. Mon cœur bat la chamade. C’est à ne plus y tenir. Je vis. J’aime. Je ris, je pleure à gros sanglots. Mon émotion s’apaise peu à peu et me dépose à terre, m’enracine. J’entre progressivement dans de nouvelles profondeurs, celles de mon intériorité. Et je reste là sans bouger, à la fois intensément présente à l’instant et ouverte à tous les possibles.
Dans cet état de reliance, je reprends le cours de mon exploration à la recherche d’un endroit pour dormir. C’est tout un rituel. Je tourne et tourne comme un chien dans son panier, jusqu’à ce que je sente que c’est là, et pas ailleurs. Un tapis de mousse, les racines accueillantes d’un arbre, une alcôve sous des branchages ou un antre de rochers… Sous la voûte des branches et des étoiles entrecroisées, je suis chez moi et j’y suis infiniment bien. A même le sol, je me couvre de mon duvet, posant ma tête sur un coussin de feuilles ou sur la souche moussue d’un arbre.

Et là, dans les bras gigantesque du monde, je me laisse glisser dans le sommeil… et m’éveille. En nature, je dors « éveillée », non seulement parce que mes sens s’exacerbent, mais aussi parce qu’à ce moment-là, je me sens pleinement moi-même, mon épiderme collé à l’épiderme de l’univers, ouverte à sa dimension. La frontière entre mon espace intérieur et l’extérieur s’évanouit, et je navigue à la bordure du monde, sur la fine crête entre rêve et réalité.
Ma nuit est peuplée de songes et de visiteurs : une troupe de marcassins qui cherchent des glands sous le chêne où je me suis installée, une chouette qui joue les effraies, un renard qui furète, quantité de bestioles qui s’ingénient à gratter le sol autour de ma tête, la lune qui m’éclaire comme un projecteur et les gouttes de rosée qui me rincent le visage. Que dire du grand cerf qui, tel un magicien, apparaît au cœur de la clairière en soufflant sa brume blanche avant de disparaître ? Que dire du loup que je sens à mes côtés et qui, malgré l’admiration que j’ai pour lui, réveille en moi les peurs de toutes les générations passées ?

La peur des entrailles

Car bien sûr, il m’arrive aussi d’avoir peur, une peur qui vient de si loin, qu’elle me semble venir du temps où j’étais singe, ou quelque mammifère susceptible d’être dévoré par un carnassier. Une peur des entrailles sur laquelle le rationnel n’a aucune prise. Mes poils se dressent littéralement sur ma peau (je l’ai observé), mes tempes bourdonnent, je ne suis plus qu’un grand cœur qui bat, et mes terreurs enfantines en profitent pour s’exprimer. Ce que je vis alors, est, me semble-t-il le face-à-face intégral de l’humanité et du sauvage. Une seule issue : s’abandonner, laisser faire, s’ouvrir, entrer en résonance avec le monde. C’est la forêt qui vient à ma rencontre, me parle, m’apaise et m’apprivoise. L’effroi dépassé, c’est une grande libération et une grande paix. Le sentiment d’avoir été nettoyée en profondeur.
Il me faut parfois plusieurs nuits d’affilée en forêt pour parvenir à faire sauter les verrous de mes résistances et à me retrouver en symbiose. Les premiers moments de retrouvailles, surtout après une longue absence, sont les plus difficiles, car ils portent en eux le souvenir de la perte, de notre séparation d’avec la nature, d’avec nous-mêmes. Plus l’absence est longue, plus la cicatrisation est lente. Heureusement, quelque chose en nous se souvient. En nous immergeant dans la nature, nous célébrons des retrouvailles, comme celles de l’enfant perdu et de sa mère, douloureuses mais réparatrices. Il n’est à mon sens pas d’exercice d’écologie et de reconnexion plus efficace, que cette immersion inconditionnelle dans la nature.

L’appel de la forêt

L’expérience de la forêt peut être vécue comme une expérience « religieuse », au sens où elle permet de se relier à la nature, à soi-même et à ce qui nous dépasse. La forêt est un nœud condensé de sens où germent tout à la fois la lumière et la nuit. Elle est le point de jonction subtil entre le visible et l’invisible, entre le conscient et l’inconscient, entre les profondeurs du monde et nos propres profondeurs. En son cœur se croisent les sillons intemporels des grands mythes et ceux de nos rêves les plus intimes.

En entrant dans la forêt, nous pénétrons dans notre espace intérieur, truffé d’ornières, de ronces, de bêtes sauvages et de sorcières, mais aussi de fées, de princesses et d’hommes au cœur pur. Miroir de nos pulsions et de nos démons qui, sortis de leurs tourbières, se métamorphosent, la forêt est aussi un espace de transmutation et d’épuration que nous devinons aujourd’hui salvateur.
La forêt est le lieu où le sauvage peut encore s’exprimer, où le loup, l’ours et autres animaux libres résistent à l’homme domestiqué qui tente vainement de les chasser hors de lui. Tant qu’il restera quelque espace sauvage où vibre l’âme du monde, nous pourrons nous y abreuver et, par notre émerveillement et notre amour, le nourrir en retour.

Christine Kristof

Christine Kristof est journaliste, membre des JNE (Association des Journalistes pour la Nature et l’Ecologie), coordinatrice de l’ouvrage collectif Ecologie et Spiritualité; la rencontre (Yves Michel 2004), co-fondatrice du Réseau des Ecosites Sacrés et du mouvement « Chrétiens Unis pour la Terre ».